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De moins en moins de sexe

La tête dans le cul - Chronique sur le sexe et le couple ouvert
La sexologue Myriam Daguzan Bernier vulgarise certaines questions sexuelles avec «La tête dans le cul». Photo: Métro

De plus en plus de gens mettent de côté la sexualité. Choix féministe? Politique? Personnel? Identitaire? Et si le sexe n’était plus une priorité?  

La question peut sembler intense, voire déstabilisante. Dans une société où la sexualité tient une place de choix – que dis-je, une place prédominante, difficile de croire qu’on en arrive à se demander si le sexe peut être facultatif. Pourtant, pour certain.e.s, c’est bien le cas. Dans un récent article de The Guardian, on rapporte que « les humains sont de moins en moins actifs sexuellement ». Des personnes vont même jusqu’à éradiquer complètement cette activité de leur vie. The Guardian rapporte que dans la dernière enquête nationale sur les attitudes et les modes de vie sexuels en Grande-Bretagne, 16 % des hommes et 22 % des femmes âgés de 16 à 74 ans sont sexuellement inactifs, et pour la plupart d’entre eux, ce n’est pas un problème. Même son de cloche chez Scientific American, ainsi que chez BBC Science Focus. Coudonc, que se passe-t-il avec nos libidos?  

Dans mon bureau, les raisons se résument à ceci : fatigue, lassitude, fluctuations du désir, image corporelle affectée par les changements physiques dus au manque d’activité pendant la pandémie, la FODA (Fear of Dating Again) ou la peur de recommencer à dater après la COVID, ainsi qu’un ras-le-bol senti face aux applications de rencontres qui ouvrent sur un monde assez compétitif, où l’on peut aisément se sentir bousculé.e et dépassé.e… Sans oublier le fréquent problème du décalage entre le désir de l’un.e versus de l’autre au sein d’un couple. On évoque aussi la difficulté à retrouver des relations saines après les mouvements #MeToo. Chez plusieurs femmes et personnes féminines qui consultent, le défi est de savoir comment vivre avec la perte de confiance envers la gent masculine et la peur d’abus potentiels. Du côté des hommes et personnes masculines, c’est la crainte d’être perçu.e.s. comme une menace et savoir comment se définir en tant que figure de la masculinité, dans une ère où l’on questionne énormément les rapports de pouvoir hommes/femmes. Et, de façon générale, on sent aussi un grand, très grand épuisement chez beaucoup de gens.  

On a souvent pointé du doigt Netflix et les médias sociaux comme facteurs « aggravants », si l’on veut, de l’état de notre sexualité. Mais encore faut-il se demander si cela est réellement grave. Bien sûr, on sait que la sexualité sert à la reproduction et à la survie de notre espèce. Mais si on reste sur une base purement factuelle, rappelons-nous que l’être humain ne souffrira d’aucune carence s’il n’a pas de sexualité. Si cela est volontaire, évidemment.  

Plus de gens osent aujourd’hui affirmer être sur le spectre de l’asexualité ou carrément asexuels. Au regard des vagues de #MeToo, on se questionne aussi beaucoup sur les comportements à adopter face au sexe et, surtout, à ce que l’on veut comme relations intimes. Le fossé orgasmique* n’est jamais bien loin non plus.  

Du côté de la science, des études récentes, dans lesquelles on s’est penché sur cette baisse d’activité sexuelle, dénotent qu’il y a une plus grande aisance à parler de sexualité ouvertement et, conséquemment, une capacité à mieux exprimer ce que celle-ci apporte (ou non) à leur vie. On parle aussi d’une augmentation de « célibataires volontaires » qui embrassent du même coup l’abstinence afin de se concentrer sur leurs propres besoins.  

Et… pourquoi pas? L’injonction à la sexualité est tellement forte qu’il est normal que cela devienne lourd à porter et qu’on en vienne à se demander si le jeu en vaut la chandelle. Quand on sait qu’en plus, l’anxiété de performance s’invite souvent sous la couette, disons que ça peut remettre en question nos priorités. Sexualité incluse. Et si ça vous inquiète, vous pouvez quand même en parler à un.e sexologue.  

* Si vous avez raté le bateau, sachez qu’il existe un écart assez important entre le plaisir ressenti chez les hommes versus celui des femmes dans les relations hétéronormatives, basées sur la pénétration. Si 95% des hommes arrivent à avoir un orgasme, c’est seulement 65% des femmes qui arriveront à l’atteindre. On a nommé cela le « fossé orgasmique ».  

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