Faire cesser les féminicides, oui mais comment?
En cette Journée internationale des droits des femmes, Métro a choisi de se pencher sur la sensible question des féminicides et de la montée de la violence dans la sphère intime depuis la pandémie. Quelles sont les solutions possibles et comment peut-on faire diminuer, ou idéalement faire cesser les meurtres de femmes au Québec?
D’abord, est-ce une fausse idée que l’on a que le nombre de féminicide augmente? Selon Catherine Gauthier, co-coordonnatrice au Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale, la violence augmente bel et bien dans la société en ce moment. «Oui ça se peut donc que les féminicides augmentent aussi, mais il y aussi le fait que l’on en entend aussi plus parler qu’avant. Ce phénomène n’est pourtant pas récent, il a toujours existé, mais on a plus d’information à ce sujet.»
Les raisons de la montée de la violence restent plus mystérieuses, bien que les preuves de leur existence soient nombreuses. «Pendant la pandémie les gens étaient plus isolés, donc dans ce temps-là la violence augmente, surtout au niveau des relations intimes et conjugales. Il y aussi les conversations malsaines sur les réseaux sociaux, et les menaces et les commentaires haineux que les personnalités publiques, surtout les femmes, reçoivent de plus en plus», constate Catherine Gauthier.
Quelles sont les solutions?
La question qui nous brule les lèvres apparait évidente: quelles sont les solutions pour contrer un tel fléau? Mme Gauthier croit qu’il y en a plusieurs. «D’abord il faudrait que la violence soit plus considérée au niveau législatif et pénalisée plus durement. On voit une tendance au niveau des agressions sexuelles qui reçoivent une peine au domicile plutôt qu’en prison, donc malheureusement ça envoie le signal que les agressions sexuelles ce n’est pas si grave», commence-t-elle.
Ensuite, il y de la prévention et de la sensibilisation à faire au niveau de la population. «Ce n’est pas rare quand il y a un féminicide qu’on entende ensuite le voisinage ou les proches dire qu’il étaient au courant qu’il y avait de la violence dans la maison. Mais les gens n’avaient rien fait ou choisi de ne pas s’en mêler. Donc il faut que les gens agissent plus afin de protéger les personnes vulnérables.»
On sait aussi que les femmes avec un plus grand réseau social sont en quelque sorte mieux protégées si elles subissent de la violence, par opposition à une femme qui est complètement isolée. «Souvent, les hommes violents ont comme tactique d’isoler leur victime, ce qui est gros signe d’alerte», soutient-elle.
Elle pense aussi que des efforts supplémentaires doivent être mis sur la prévention au niveau des écoles pour apprendre aux jeunes l’importance des relations familiales saines, de l’égalité entre les genres, et les informer sur les types de violence dans les fréquentations amicales et amoureuses pour qu’ils soient plus alertes. «On doit leur apprendre à ne plus tolérer ces comportements là parce qu’on sait que les jeunes ont tendance à tolérer les comportements violents de leurs amis.»
Au niveau des hôpitaux, Mme Gauthier croit qu’il faudrait qu’il y ait plus de suivis et d’interventions ou au moins, de questionnements. «On sait que les femmes qui subissent un féminicide ont souvent par le passé été une ou plusieurs fois à l’hôpital parce qu’elles ont subi des violences physiques. Beaucoup trop passent entre les mailles du système, donc il faudrait que les employés du système de santé soient plus alertes à ce niveau pour vraiment pouvoir intervenir et donner de l’aide aux femmes victimes de violence.»
Toutes ces idées ajoutées les unes aux autres pourraient aider à prévenir les féminicides.
Quels sont les services offerts
Divers services sont offerts au Québec pour venir en aide aux femmes victimes de violence avant qu’elle ne deviennent des victimes de féminicide, mais ceux-ci sont souvent débordés ou pleins et majoritairement sous-financés. Le sous-financement gouvernemental pourrait-il expliquer en partie l’augmentation des féminicides? «Au niveau des services on a des maisons d’hébergement, des organisations féministes et des organisations communautaires de femmes qui peuvent soutenir et aider la femme à trouver des solutions. Mais comme la demande a augmenté dans les dernières années, ces ressources sont souvent difficiles d’accès et ont des listes d’attente. Les subventions ne suivent pas la demande, donc les centre d’hébergement n’ont pas les ressources financières pour augmenter leur offre de services. On est dans une impasse qui pénalise les femmes», explique Mme Gauthier.
Est-ce-que l’un explique l’autre, c’est à dire est-ce que le manque de financement crée un manque de services, ce qui finit par faire en sorte que des femmes qui en auraient besoin se retrouvent prises et obligées à rester dans leur milieu violent? «C’est sûr que c’est une suite logique. S’il y avait plus de ressources d’hébergement, il y aurait moins de féminicides», croit fermement Catherine Gauthier.
Voici quelques ressources auxquelles il est possible de faire un don afin d’aider à protéger les femmes victimes de violence:
Maison des femmes de Québec : https://maisondesfemmesdequebec.com/
Maison Hélène-Lacroix : https://maisonhelenelacroix.com/
Maison Marie-Rollet : https://www.maisonmr.com/
Maison pour femmes immigrantes : https://www.maisonpourfemmesimmigrantes.com/
YWCA : https://ywcaquebec.qc.ca/
Selon le rapport #CallItFeminicide de l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisation (OCFJR), 173 femmes et filles ont été tuées au Canada en 2021.
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