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Pour que personne ne meure de froid, le communautaire se serre les coudes

Tribune libre Métro
Photo: Infographie Métro Média

Alors que la majorité de la population s’affaire aux derniers préparatifs pour le temps des fêtes, le milieu communautaire en itinérance de Québec ne peut faire autrement que de s’inquiéter pour ceux et celles qui passeront la nuit dehors en ces jours de festivités. Nous voulons leur dire : nous pensons à vous et nous ne lâcherons pas. Vous avez aussi des droits. Du potentiel. De la dignité.

À l’heure actuelle, des trous de services importants sont décriés. La situation est d’autant plus alarmante avec l’arrivée des grands froids. Bien que nous sachions pertinemment que l’hiver revient tous les ans, nos décideurs semblent être pris par surprise à chaque fois. Les mesures hivernales sont déployées beaucoup trop tard et, chaque année, la planification de services est à refaire. Un éternel recommencement désespérant.

Cette année encore, les mesures hivernales déployées sont loin d’être suffisantes pour répondre à l’ensemble des besoins des personnes en situation d’itinérance à Québec. Plus que jamais, nous craignons que des personnes que nous accueillons et accompagnons au sein de nos ressources meurent de froid. Les ressources en hébergement d’urgence sont à pleine capacité : elles se voient dans l’obligation de refuser de plus en plus de personnes tous les soirs, bien malgré elles, faute de place. Les organismes communautaires offrant des services à la population itinérante débordent tout autant. Le nombre de demandes ne cesse d’augmenter alors que les besoins auxquels les organismes doivent répondre se complexifient.

La situation à Québec est loin d’être isolée. Le Réseau Solidarité Itinérance du Québec (RSIQ) a d’ailleurs sonné l’alarme sur la situation dans toute la province : les mesures hivernales déployées sont insuffisantes pour une majorité de régions. Le Regroupement pour l’Aide aux itinérantes et itinérantes de Québec (RAIIQ) joint sa voix à celles des autres concertations régionales en itinérance pour demander au gouvernement du Québec de reconnaître l’urgence d’agir sur l’ensemble du territoire et de porter des actions concrètes pour éviter le pire cette année. 

Par sa Politique nationale de lutte à l’itinérance, le gouvernement du Québec reconnaît la responsabilité collective face à cet enjeu. Alors, les questions qui nous habitent en ce début d’hiver sont les suivantes : à qui revient l’imputabilité en cas de décès d’une personne forcée de survivre à une nuit à l’extérieur ? Où doit-on aller quand il n’y a plus de place dans les organismes et qu’on n’a nulle part où se poser et se réchauffer? Quels seront les impacts dans la vie des personnes qui subiront des engelures majeures cet hiver faute d’endroit où se réchauffer par grand froid? 

Nos questions sans réponses sont nombreuses et nos inquiétudes réelles.

Nous avons besoin que les personnes au pouvoir prennent au sérieux les responsabilités qui leur sont confiées et qu’elles incarnent un leadership positif qui s’appuie sur l’expertise du communautaire. Malgré des décennies d’action et d’intervention concrète en itinérance, le peu de reconnaissance et de soutien reçu nous force à revendiquer un meilleur financement à la mission, une plus grande autonomie d’action et des conditions de pratiques dignes du travail accompli au quotidien. Ce travail, que nous accomplissons avec cœur, profite à toute la collectivité, tous les jours. Alors que le financement par projet non récurrent est devenu la norme, que nous devons composer avec des redditions de compte incessantes et une multiplication des bailleurs de fonds pour maintenir nos organismes vivants, nous sommes maintenus dans une position de sous-traitants de l’État qui nous fait violence tous les jours. À quand un vrai partenariat qui incarne une réelle responsabilité collective en itinérance?

Les moyens dont dispose le milieu communautaire sont insuffisants pour lui permettre d’offrir une couverture de services qui ne laisserait personne filer entre ses mailles. Dans le contexte actuel, les organismes en itinérance doivent composer avec une pression grandissante : crise du logement, pénurie de main-d’œuvre, inflation, système de santé défaillant, programmes sociaux restrictifs. La population se précarise à une vitesse grand V et de plus en plus de gens se tournent vers les ressources communautaires. L’instabilité résidentielle et l’itinérance sont des réalités qui peuvent arriver à chacun.e d’entre nous et l’équilibre ne tient qu’à un fil pour ne nombreuses personnes.  

Pendant que notre filet social s’effrite, qu’une partie importante de la population s’appauvrit et que de plus en plus de gens sont à risque ou basculent en situation d’itinérance, le communautaire se mobilise et se serre les coudes pour faire plus avec moins.

Peut-on dire que nos gouvernements en font autant?

Le Regroupement pour l’Aide aux Itinérantes et Itinérantes de Québec (RAIIQ)

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