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Urgent de sauvegarder les milieux humides et hydriques de Québec

Tribune libre Métro
Photo: Infographie Métro Média

L’agglomération de Québec, qui inclut Saint-Augustin et L’Ancienne-Lorette, doit déposer un plan régional des milieux humides et hydriques auprès du ministère de l’Environnement (MELCCFP) en décembre prochain. Ce plan servira aux villes dans leurs orientations de protection et le ministère de l’Environnement en tiendra compte dans la délivrance de ses autorisations de travaux dans ces milieux. Nous considérons que ce plan devrait démontrer de l’ambition à la hauteur des défis environnementaux actuels.

Les milieux humides (marais, étang, prairie humide, marécage et tourbière) exercent des fonctions essentielles à l’équilibre écologique. Ils constituent des puits de carbone et des îlots de fraîcheur, surtout lorsqu’ils abritent arbres ou arbustes, ce qui est le cas pour 80% des surfaces humides de l’agglomération. Ils jouent un rôle crucial dans la qualité de l’eau et contribuent à réduire les risques d’inondation. Les milieux humides forment également des habitats uniques dont dépendent plusieurs animaux vivant sur notre territoire : salamandres, grenouilles, héron, butor, bécasseau…

Les milieux hydriques, quant à eux, donnent vie à de multiples espèces de poissons, d’oiseaux, d’amphibiens et de mammifères. De nombreuses superficies en milieux humides et hydriques ont été perdues à l’échelle du Québec et de notre agglomération. C’est pourquoi la Loi sur la qualité de l’environnement vise le zéro perte nette de ces milieux tant en matière de superficie que de fonctions écologiques. Cet objectif est cependant impossible à atteindre dans un avenir prévisible.

Une compensation monétaire est exigée pour la perturbation ou la destruction d’un milieu humide important. Les compensations sont versées dans un seul fonds servant au rétablissement ou à la création de milieux humides ou hydriques dans la région concernée par la perte. Jusqu’ici, moins de 3% des sommes ont été utilisées depuis 2017, démontrant qu’il y aura toujours un délai significatif entre la perte et la reprise présumée des fonctions de ces milieux. De surcroît, la réhabilitation ou la création coûte toujours davantage et les terrains libres sont de plus en plus rares et onéreux.

À l’échelle de l’agglomération, il reste 8% de milieux humides dont seulement 2,4% dans le périmètre d’urbanisation, c’est-à-dire là où le développement est prévisible. Précisons que tous les milieux humides n’apparaissent pas sur la carte préliminaire accompagnant le plan projeté. En sera-t-il de même pour la carte définitive? Dans ce plan, l’agglomération tenterait de préserver 87% des superficies totales des milieux humides qu’elle qualifie d’«intérêt». Pour ce qui est des milieux hydriques, 68% des cours d’eau et 68 des 80 lacs seront considérés d’«intérêt». Les villes tiendront-elles compte de toutes les espèces animales vivant dans les milieux détruits ou seulement des espèces considérées rares selon les lois actuelles?

Les villes ne semblent pas prendre en considération les sources d’eau encore potables, à part celles qui nous abreuvent actuellement. Pourtant, l’eau de la Saint-Charles se raréfie au moment des sécheresses et l’eau du fleuve pourrait devenir salée avec les changements climatiques. Dans son Plan, l’agglomération entend réhabiliter, voire recréer, des milieux humides. Étant donné les programmes gouvernementaux en vigueur permettant de subventionner de tels projets, elle considère cela comme autant d’«opportunités». S’il est envisageable de construire de nouveaux aménagements nous permettant de mieux gérer les eaux de ruissellement, ils ne constitueront pas des milieux où foisonnera la biodiversité! La réhabilitation de milieux humides et hydriques perturbés est également souhaitable, mais seulement quand la nature n’aura pas procédé elle-même à cette réhabilitation.

Nous nous demandons par ailleurs comment la ville de Québec pourra inciter les propriétaires et les promoteurs à ne pas empiéter sur les milieux d’«intérêt» puisqu’elle ne donne pas toujours l’exemple. Mentionnons le secteur Chaudière, où 17 hectares de milieux humides ont été détruits, car la Ville s’apprête à procéder à la construction du terminus et des autres installations du tramway dans 10 hectares jusqu’ici préservés plutôt que derrière le IKEA, où toute trace de vie a disparu. De plus, la poussière et le bruit occasionnés par cette construction, à côté de milieux humides actuellement protégés, occasionnera aussi la mort d’un grand nombre d’animaux.

En substance, l’agglomération annonce qu’elle ne sauvegardera pas certains milieux humides et hydriques et, en plus, ceux qu’elle entend préserver ne seront pas tous protégés malgré l’adoption du plan. En effet, le zonage habitation actuellement en vigueur, par exemple, encourage les promoteurs à obtenir une autorisation du MELCCFP pour développer dans ces milieux. L’agglomération devrait pourtant viser l!intérêt collectif en sauvegardant, au plus tôt, tous les milieux qui remplissent encore leurs fonctions à l’égard des humains et de l’ensemble du vivant. Les destructions passées de nombreux milieux humides et hydriques, les changements climatiques et l!effondrement de la biodiversité justifieraient amplement une telle orientation. Ne pas agir en ce sens risque de nous coûter cher!

Cosignataires: Lucie Bergeron, Transition Capitale-Nationale; Hélène Bard, Sauvons les arbres et les milieux naturels de Beauport; Serge Roy, Collectif La ville que nous voulons; Collectif Montchâtel fort de nature; et Collectif Sauvons les milieux naturels dans Chaudière

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