Carte interactive: près de 10% du Québec sous un claim minier
Québec solidaire a créé une carte interactive permettant de consulter tous les claims miniers au Québec. Cette initiative vise à sensibiliser la population à l’importance de cet enjeu, alors que près de 10% du territoire québécois fait l’objet d’un permis d’exploration minier. Le parti propose également de demander un moratoire sur les claims, alors qu’il a déposé un projet de loi en ce sens le 18 avril dernier.
Cette carte met en évidence l’ampleur de l’expansion des claims miniers dans la province. Pour le parti, l’objectif est de «rendre visible l’expansion des claims miniers au Québec», expliquait en entrevue avec Métro la porte-parole en matière de ressources naturelles, Alejandra Zaga-Mendez.
Au total, on compte 302 564 claims actifs partout au Québec.
Elle souligne que les populations locales sont souvent inquiètes face à l’impact potentiel de l’exploitation minière sur leur environnement, notamment sur les zones protégées, les lacs et les rivières. Mme Zaga-Mendez ajoute que plusieurs maires et citoyens sont préoccupés par cette situation et demandent des moratoires.
Le parti souhaite ainsi encourager un développement «mieux planifié et harmonieux», en «consultation avec les communautés concernées». «L’objectif n’est pas d’aller contre le développement, mais de prendre une pause, un an, deux ans, puis de planifier ces développements-là avec les communautés», précise l’élue solidaire.
Une augmentation de 65% en deux ans
Le nombre de claims miniers a augmenté de 65% en deux ans. Certaines régions, comme l’Outaouais et Lanaudière, connaissent une hausse encore plus marquée, respectivement de 211% et 408% entre janvier 2021 et juin 2022. Par exemple, dans la région de l’Outaouais, des claims ont été enregistrés près du parc de la Gatineau, tandis que dans Lanaudière, des zones écotouristiques sont également concernées.
Rappelons qu’un claim minier est un droit accordé par le gouvernement à une entreprise pour explorer le sous-sol d’une zone déterminée en vue d’y découvrir des ressources minérales. Il est très facile de s’en procurer un puisqu’il suffit de se rentre sur le site du ministère des Ressources naturelles muni d’une carte de crédit. Ils ne coûtent souvent pas plus d’une centaine de dollars.
Les claims miniers ne donnent pas automatiquement droit à l’exploitation, mais leur multiplication peut être perçue comme un indicateur de l’intérêt accru des compagnies minières pour un territoire.
Québec solidaire souhaite que sa carte interactive encourage le débat public sur l’avenir de l’exploitation minière au Québec. Les citoyens pourraient ainsi mieux comprendre les enjeux liés à l’octroi de claims miniers et les implications pour leur environnement et leur qualité de vie, selon le parti.
Le Québec, far-west de l’exploitation minière
Alejandra Zaga-Mendez a également déposé un projet de loi visant à instaurer un moratoire et à modifier la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, en retirant un article qui donne préséance à la Loi sur les mines. Une modification qui donnerait aux municipalités plus de pouvoirs quant au contrôle sur le développement et la protection de leur territoire.
On fait face à un véritable boom minier en ce moment au Québec et notre régime minier est digne du Far West. […] Si on veut prendre le temps de bien faire les choses, il faut décréter dès maintenant un moratoire sur les nouveaux claims miniers en attendant la consultation sur les activités minières prévue ce printemps.
Alejandra Zaga-Mendez, députée de Québec solidaire
La proposition de Québec solidaire a reçu le soutien de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et de la Fédération québécoise des municipalités (FQM). Une coalition d’organismes environnementaux avait fait la même demande en août 2022.
Dans un contexte où la pression pour exploiter les ressources naturelles s’intensifie, Québec solidaire croit que cette carte interactive et le projet de moratoire contribueront à favoriser un développement plus équilibré et respectueux de l’environnement, tout en répondant aux préoccupations des citoyens et des municipalités.
En séance au Salon bleu au mois d’avril, la ministre des Ressources naturelles, Maïté Blanchette Vézina, s’était montrée réticente à un tel moratoire, le qualifiant de «dangereux». Selon elle, cela enverrait un message que le Québec «freine la décarbonation de l’économie, ne veut plus faire partie des gouvernements qui souhaitent mettre de l’avant la décarbonation».
Un système qui séduit l’industrie minière
L’industrie minière voit d’un très bon œil la facilité avec laquelle il est possible de revendiquer un territoire à des fins de recherche, et éventuellement d’exploitation minière. Une filière que la Coalition avenir Québec (CAQ) souhaite également soutenir, pour la production de minerais nécessaires à la fabrication de batteries, par exemple.
Le responsable du suivi de l’exploration minière au sein du ministère des Ressources naturelles du Québec, Jonathan Lafontaine, s’est rendu, à la fin de 2022, à la Conférence internationale sur l’exploitation minière et les ressources en Australie. Il y vantait la simplicité du système québécois pour les entreprises minières.
«Le premier point de départ est notre base de données. S’il y a un territoire qui, pour quelque domaine que ce soit, qu’il s’agisse de géologie, de géochimie ou de géophysique, vous plaît, vous pouvez le revendiquer par l’intermédiaire de notre système de gestion en ligne qui vous permet, tout simplement en cliquant et s’il n’y a pas d’autres obstacles territoriaux, d’obtenir votre claim automatiquement en quelques minutes», expliquait-il.
«C’est un niveau supérieur, c’est incroyable qu’il ne soit pas nécessaire d’être sur place pour faire des choses», répond son interlocuteur, Shaun Fox, fondateur de FOXI Ressources, une société d’investissement et d’acquisition dans de nombreux projets miniers en Australie et aux États-Unis. Et, bientôt au Québec?