Entre thriller et tribune masculine
ROMAN. Louis-François Dallaire, originaire de Beauport, a sorti son dernier roman Le jour où mon meilleur ami fut arrêté pour le meurtre de sa femme. Sur fond de thriller, l’auteur traite des défis sociaux masculins, casse les stéréotypes et visibilise la violence conjugale à l’égard des hommes.
«C’est une histoire que j’avais en tête depuis longtemps, explique l’auteur qui est aussi travailleur social. Je me souviens de la lecture de ce fait divers où un homme avait assassiné sa femme au cours d’une escalade de violence conjugale. Et je me suis posé cette question, si c’était mon meilleur ami qui était dans cette situation, comment réagirais-je?»
Dans ce roman, l’écrivain raconte l’histoire de David qui un 21 décembre se livre à la police pour le meurtre de sa femme. Il l’aurait assassiné en réaction à la violence conjugale dont il était victime depuis des années. Sébastien, son meilleur ami, sait de source sûre qu’il n’a pas commis ce meurtre. Il tente de comprendre ce que cherche à prouver David en s’attribuant la responsabilité de ce crime qu’il n’a pas commis.
Casser les stéréotypes masculins
Au fil de l’histoire, l’auteur tente de déconstruire des stéréotypes masculins. À commencer par le thème de la violence conjugale à l’égard des hommes. «Plus j’avance et plus je réalise que beaucoup d’hommes vivent cette situation mais ne la reconnaissent pas, constate-t-il. La violence envers les hommes est souvent plus subtile.»
Le travailleur social qui, selon ses dires, «n’est jamais loin de l’auteur», analyse la dimension tabou, interdite et délicate qui entoure la dénonciation de ce type d’actes. «On a fait du chemin depuis quarante ans mais les vieux stéréotypes masculins ont encore la vie dure. Ils représentent une contrainte supplémentaire pour les hommes victimes de violence conjugale quand vient le moment d’en parler.»
«Les histoires des gens nous habitent lorsque l’on fait de la relation d’aide et d’intervention sociale.»
Louis-François Dallaire
En cause, cette injonction de virilité. «L’idée derrière le roman était de jouer avec les idées reçues sur la masculinité, de remettre en question ces stéréotypes et de montrer qu’il y a beaucoup d’exception.» Ces victimes invisibilisées prennent corps avec les personnages romanesques, tout en étant porteur de message. «J’avais envie de montrer cette vulnérabilité. La violence est une expérience de vulnérabilité. La manière dont les hommes ont été socialisés, et le sont encore, malheureusement, nous sommes aux antipodes de ce que la socialisation masculine prône», regrette l’auteur.
L’amitié entre hommes est également analysée à travers l’histoire. «Pour moi ce thème est aussi important que le premier», lâche M.Dallaire. Celui qui regrette que l’amitié entre hommes soit souvent décrite de façon «superficielle» teintée de beuveries et de comparaison de conquêtes, estime que la plupart des œuvres ont malheureusement tendance à «perpétuer ce stéréotype». Pour illustrer cette ambiguïté, l’auteur évoque l’apparition du terme Bromance, «avoir un mot décloisonne la vision masculine mais, il y a le terme romance. C’est comme si encore une fois il y avait ce présumé lien affectif entre deux hommes c’est qu’il y a quelque chose d’un peu romantique ou amoureux, alors que ça n’a rien à voir!», dénonce-t-il.
Puiser dans son parcours
L’auteur s’est nourri de son expérience de terrain pour romancer son histoire. «Quand je suis avec les gens ils m‘exposent leurs problèmes, leurs pensées, leurs sentiments. Mon travail a influencé mon écriture.»
Si bien qu’il avoue prendre constamment du recul pour analyser son personnage et s’assurer que les traits ne ressemblent pas d’un peu trop près à ce qui a pu un jour lui être confié. «Ça ne m’est jamais arrivé mais je dois toujours faire l’effort de me poser la question.»
L’auteur tiendra une séance de dédicace ce samedi à la librairie du cinéma Le Clap pour son livre Le jour où mon meilleur ami fut arrêté pour le meurtre de sa femme.