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Non, aucun chien n’est totalement hypoallergénique

Chien hypoallergénique
Josée Nadia Drouin - Agence Science-Presse

Votre marmaille souhaite accueillir un chiot à la maison. Mais voilà, le petit dernier éternue dès qu’il se trouve en présence de ces petites bêtes à poils. Comment accéder à leur demande sans hypothéquer leur santé ? Une solution souvent évoquée : un chien hypoallergénique. Une décision non sans conséquence, explique le Détecteur de rumeurs. 

L’origine de la rumeur 

Les premières mentions du terme « hypoallergénique », accolé au genre canin, remontent au milieu du 20e siècle. Mais l’intérêt du public pour les races dites « hypoallergéniques » aurait pris son envol grâce à la famille Obama, ont rapporté des chercheurs américains en 2011 : après l’acquisition fort médiatisée de Bo, un chien d’eau portugais, une race réputée « hypoallergénique ».

Allergie : la faute aux poils ?

Contrairement à la croyance, ce ne sont pas les poils du chien qui causent la réaction allergique, mais bien une classe de protéines présente dans la salive, les squames — des particules de peau qui tombent avec les poils — et l’urine de l’animal. C’est donc le contact avec l’un ou l’autre, et non strictement avec le poil, qui induit une réaction allergique. 

Qu’un chien ne perde pas ou très peu ses poils est néanmoins évoqué comme une protection contre les réactions allergiques. À ce sujet, des chercheurs espagnols ont conclu dans une étude publiée en 2018 que la faible perte des poils n’éliminerait pas l’exposition à la salive des chiens ni aux autres allergènes, ces différentes protéines retrouvées dans les squames, ou dans l’urine, et qui peuvent contribuer aux symptômes de l’allergie. 

« On pourrait en effet penser, explique Frédéric Sauvé, dermatologue-vétérinaire et professeur adjoint à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, basée à Saint-Hyacinthe, que ces chiens distribueraient moins de squames dans l’environnement et qu’ainsi, les personnes allergiques y seraient moins exposées. Mais dans les faits, même les chiens nus (sans poils !) peuvent induire une réaction allergique, par contact avec leur salive ou leur urine. » 

Des races hypoallergéniques : pas de preuve

Devant la popularité grandissante des races de chiens dites hypoallergéniques, les chercheurs américains cités plus haut se sont demandé si le niveau de production de ces protéines, dont la Can f1, pouvait différer entre ces races et les autres. 

Bien qu’ils admettent que leur étude comporte des limites, dont un trop petit nombre de chiens par race, ils ont constaté que les maisonnées détenant des chiens « hypoallergéniques » présentaient autant et parfois plus d’allergènes que celles possédant des chiens d’autres races. 

La chercheuse principale de cette étude, Christine Cole Johnson, avait déclaré en 2011 au magazine Time : « Nous n’avons trouvé aucune preuve scientifique indiquant que les chiens qualifiés d’hypoallergéniques sont moins allergènes. […] Cette idée que vous pouvez acheter une certaine race de chien et penser qu’il n’y aura pas de problèmes allergiques auprès d’une personne déjà allergique aux chiens n’est pas corroborée par notre étude. »

Une autre étude, publiée l’année suivante, arrivait à la même conclusion en analysant cette fois les niveaux de cette protéine sur le pelage des chiens dits hypoallergéniques. Il en ressort que cette protéine peut bel et bien se trouver en grande concentration chez les chiens hypoallergéniques. Qui plus est, la concentration de la protéine Can f1 peut varier davantage entre individus d’une même race qu’entre ceux de races diverses. 

Un marché ?

Si la perte ou non des poils chez les chiens a été qualifiée d’anecdotique dans une autre étude, parue en 2018, sur les caractéristiques canines et le risque de souffrir d’asthme chez les enfants, certains estiment que cette caractéristique est née avec le marché. 

Ainsi, en 2019, Melanie Carver, alors vice-présidente à la santé communautaire de la Fondation américaine d’asthme et d’allergie, a affirmé sur le site How Stuff Works que le terme « hypoallergénique » relevait davantage du marketing que de la médecine. 

« D’une certaine façon, note Frédéric Sauvé, il y a effectivement dans cette appellation — hypoallergénique — un peu de désinformation et une certaine récupération. Les animaux jouent un grand rôle auprès de nous. On a pu le constater pendant la pandémie, lors du confinement : plusieurs personnes se sont procuré un animal de compagnie. Il y a donc un marché. »

Une revue de littérature sur l’état des connaissances sur les allergies aux chiens et aux chats, réalisée en 2017 par des chercheurs coréens et américains, a conclu « qu’à ce jour, il n’existe pas encore de chat ou chien hypoallergénique, puisque pour ce faire, il faudrait que toutes les protéines allergènes soient désactivées. […] Et comme le rôle véritable in vivo de plusieurs de ces allergènes reste encore méconnu, les désactiver pourrait avoir des conséquences dommageables pour ces animaux. »

En attendant, la compagnie Purina a récemment mis sur le marché une nourriture pour chats qui prétend neutraliser les allergènes salivaires… 

Verdict

À strictement parler, il n’existerait pas de chiens « hypoallergéniques ». Toutes les races de chien (même les chiens « nus » !) sécrètent une protéine dans leur salive, leurs squames et leur urine, qui peut induire une réaction, selon le degré de sensibilité des personnes allergiques. 

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