Moins de harcèlement sexuel avec une haute direction plus féminine
L’ajout de 10% de femmes au sein du conseil d’administration d’une entreprise entraîne une baisse de 22% de l’incidence du harcèlement sexuel au cours des années suivantes. C’est ce qui ressort d’une étude publiée dans la revue Corporate Governance : An International Review, à laquelle a participé Andréanne Tremblay, professeure à la Faculté des sciences de l’administration de l’Université Laval (FSA ULaval).
Avec ses collègues Shiu-Yik Au (Université du Manitoba) et Leyuan You (Université d’État du Texas), la professeure Tremblay a analysé 2,96 millions de commentaires d’employés américains. Ceux-ci étaient répertoriés sur les sites de recherche d’emploi Glassdoor.com et Indeed.com entre 2011 et 2021.
«La méthodologie qu’on a utilisée pour aller mesurer le harcèlement sexuel en entreprise est relativement nouvelle. Curieusement, dans ces opinions anonymes, il y a beaucoup d’employés qui révèlent soit avoir été victimes de harcèlement sexuel au travail, soit avoir été témoins de situations où il y en avait», indique Andréanne Tremblay.
Selon la professeure, le fait que ce sont des sites de recherche d’emploi et non de dénonciation apporte une dimension intéressante. «Si quelqu’un rapporte un cas de harcèlement sexuel, on peut croire qu’il n’y avait aucun incitatif à le faire et donc qu’il y a vraiment un fond de vérité.»
Davantage de mesures sociales
Pour tenter d’expliquer le lien entre la présence de femmes sur un c.a. et l’incidence du harcèlement sexuel, la professeure Tremblay et ses collègues se sont penchés sur les politiques de ces entreprises. Par exemple, les congés de maternité, les avantages aux conjoints de même sexe, les vacances, les conditions de travail en général, etc.
«Les entreprises dirigées par davantage de femmes ont intégré un plus grand nombre de politiques sociales. C’est probablement par cet effet-là que ça passe. Par un climat de travail beaucoup plus agréable, plus sain, où il y a moins cette culture de harcèlement sexuel», suggère-t-elle.
Plus on va avoir des recherches qui nous aident à documenter ces effets-là, plus on va être capable d’améliorer nos pratiques de gestion dans une entreprise, mais aussi dans n’importe quel type d’organisation.
Andréanne Tremblay, professeure à la Faculté des sciences de l’administration de l’Université Laval
Pas juste pour l’image
Les résultats de l’étude démontrent aussi que les femmes ne sont pas simplement promues pour améliorer l’image de l’entreprise et donner bonne conscience au c.a. Sans disposer d’un réel pouvoir d’action, une pratique appelée le fem-power washing. «Ce n’est pas ce qu’on constate. Nos résultats sur les changements dans les politiques sociales ne sont pas cohérents avec cette théorie-là. Sinon, ça aurait été le statu quo.»
Bien que la recherche repose sur des données américaines, Andréanne Tremblay précise qu’il n’y a aucune raison de croire que les résultats au Canada seraient contraires à ceux rapportés, bien qu’ils pourraient être de magnitude différente. Elle espère que cette étude aidera à reconnaître que la diversité au sein des entreprises et des hautes directions a des avantages très variés, pertinents et tangibles.