Les excuses d’Amira Elghawaby font réagir
Les excuses qu’Amira Elghawaby a présentées au peuple québécois, mercredi, lors de sa rencontre avec le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, ont suscité de vives réactions au sein de la classe politique.
Le ministre de la Laïcité, Jean-François Roberge, avait demandé, lundi, la démission de la représentante de la lutte contre l’islamophobie. Mercredi après-midi, il a maintenu sa position lors d’une mêlée de presse.
«C’est une bonne chose, j’apprécie ses excuses, mais je ne crois toujours pas qu’elle a la légitimité et la crédibilité pour occuper ces fonctions», a-t-il affirmé.
Camille Goyette-G., la présidente de OUI Québec, un organisme qui vise à promouvoir l’indépendance du Québec, a critiqué vertement la sortie d’Amira Elghawaby sur Twitter, déplorant notamment que la représentante de la lutte contre l’islamophobie «ne reconnait même pas en quoi ses propos sont problématiques, elle s’excuse de comment ils ont blessé les Québécois».
De son côté, la membre du conseil d’administration de la Fondation pour les communautés noires et ex-présidente du Québec Community Groups Network (QCGN), Marlene Jennings, a, elle aussi, réagi sur Twitter.
Andrés Fontecilla, le député solidaire pour Laurier-Dorion, une circonscription située dans l’arrondissement de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension, à Montréal, estime pour sa part que les excuses de Mme Elghawaby démontrent «que le dialogue est possible». Il ajoute qu’il «poursuivra ce dialogue» lorsqu’il rencontrera la représentante de la lutte contre l’islamophobie au cours des prochains jours.
Le chef par intérim du Parti libéral du Québec (PLQ), Marc Tanguay, a lui aussi réagi sur Twitter, mercredi, indiquant trouver que «c’est une bonne chose» que Mme Elghawaby reconnaisse «l’impact de ses déclarations». Toutefois, le chef l’opposition officielle à l’Assemblé nationale estime que «c’est trop peu, trop tard pour mériter notre confiance».
«La lutte contre l’islamophobie est essentielle. La personne responsable d’assumer les fonctions de conseillère spéciale chargée de la lutte contre l’islamophobie doit être rassembleuse, inspirer la confiance de tous et veiller à créer des ponts. Ce n’est malheureusement pas le cas de Mme Elghawaby. Par conséquent, nous souhaitons son remplacement», a-t-il souligné.
Des groupes musulmans réagissent
D’autre part, un consortium de groupes musulmans basés au Québec a fait parvenir à Métro une réaction, en après-midi, mercredi.
Le regroupement qui inclut le Centre Al Ansar, le Forum Musulman Canadien (FMC-CMF), Institutions Canado-Marocaine D’amitié et de coopération, le Centre culturel de Laval-des-Rapides ainsi que le Quebec Islamic Cultural Centre (CCIQ) précise dans son communiqué que ses organisations membres n’acceptent «aucune insinuation selon laquelle le Québec est islamophobe ou que la majorité des Québécois sont islamophobes».
«L’islamophobie existe au Québec comme dans le reste du Canada et dans tout autre pays. Nous croyons, en tant que Québécois, que le Québec est une société ouverte», précise-t-on par ailleurs.
Toutefois, le consortium dit réitérer son appui à la nomination d’Amira Elghawaby comme représentante de la lutte contre l’islamophobie. «L’expérience et les connaissances» de cette dernière lui confèrent, selon le regroupement, toutes les compétences nécessaires pour «relever avec brio ce très important défi».
«Nous rejetons également toute tentative, directe ou indirecte, de la démettre de ses fonctions ou de la pousser à la démission. Toute tentative de ce type sera considérée comme une attaque frontale contre le droit des femmes à être en première ligne dans la lutte contre la haine et la discrimination», soutient-on également dans le communiqué.
Le consortium conclut en remerciant Québec Solidaire pour s’être abstenu de voter sur la motion qui a été adoptée, le 31 janvier, à l’Assemblée nationale du Québec et qui demandait la démission de Mme Elghawaby.
Propos controversés
Mme Elghawaby, une journaliste qui a été nommée au poste de nouvelle représentante de la lutte contre l’islamophobie par le premier ministre canadien, Justin Trudeau, s’est retrouvée dans l’eau chaude pour avoir écrit dans un article que la «majorité des Québécois» semblaient «influencés par un sentiment antimusulman».
Il s’agissait d’une remarque en lien avec l’adoption de la loi 21, laquelle interdit le port de signes religieux à certains travailleurs du domaine public. Le premier ministre du Québec, François Legault, était allé jusqu’à réclamer la démission de Mme Elghawaby. «M. Trudeau, en la gardant en poste, vient cautionner le mépris envers les Québécois
», avait-il déclaré.
Rappelons qu’Amira Elghawaby s’était une première fois excusée en anglais mercredi lors de sa rencontre avec le chef du Bloc québécois. «Je suis extrêmement désolée de la façon dont mes propos […] ont blessé le peuple québécois», a-t-elle dit. Elle a par la suite réitéré ses excuses devant les journalistes à la sortie de sa rencontre avec M. Blanchet, en français, cette fois.