Il n’y a pas si longtemps, Samuel Gagnon admirait Georges St-Pierre, vedette incontestée des arts martiaux mixtes. Depuis plus de deux ans, il lui enseigne le karaté. Récit d’une association imprévisible.
Photo Métro Média – Charles Lalande
Les deux hommes se sont rencontrés pour la première fois le 13 décembre 2013, journée où celui que l’on surnomme «GSP», alors champion des poids mi-moyens de l’UFC, annonçait qu’il mettait sa carrière en veilleuse.
Ils se sont ensuite serré la pince à quelques occasions en se croisant dans des événements. Un jour, un commanditaire organise une séance photos et vidéos.
Pour les besoins de la cause, celui qui cumule 26 victoires en 28 combats en UFC fait un yoko, aussi appelé un coup de pied de côté. «C’était un coup de pied extraordinaire, mais ses mouvements n’étaient pas à point pour le karaté. J’étais un peu mal à l’aise, mais je lui ai donné un conseil pour le corriger.»
Photo Métro Média – Charles Lalande
Six semaines plus tard, St-Pierre accoste Gagnon dans un autre événement : «J’ai pratiqué ton coup de pied en entraînement et personne n’est capable de l’arrêter!» Puis, le 6 février 2016, Stephen Thompson, un combattant qui utilise beaucoup le karaté dans les arts martiaux mixtes, terrasse Johny Hendricks avec un K.-O. au premier round.
«Deux jours après, l’agent de Georges m’a appelé pour me demander si je voulais enseigner le karaté [à son client]. Je n’ai pas hésité longtemps avant de répondre! C’est toute une opportunité d’entraîner le plus grand champion de l’industrie.» Depuis cet appel, Gagnon se rend à Montréal chaque mercredi pour l’entraîner.
Joint par l’auteur de ces lignes, Georges St-Pierre s’est fait très élogieux envers son coach et sa discipline. «Le karaté est le premier art martial que j’ai pratiqué, mais je l’ai délaissé pour le muay-thaï. Les techniques de Samuel m’ont incité à repratiquer le karaté.»
«Être un bon compétiteur ne veut pas forcément dire que tu seras un bon entraîneur. Sam, il a les deux qualités. Il explique de façon exceptionnelle. Il m’a beaucoup aidé à améliorer la dextérité dans mes jambes et à contrôler mes distances lors d’un combat», a poursuivi St-Pierre.
Photo fournie par Samuel Gagnon
Son histoire
À 5 ans, Samuel Gagnon a bien failli prendre des cours de ballet avec sa mère et sa marraine, qui enseignent toutes deux cette discipline. Une intervention du père l’a plutôt amené sur le tapis de karaté. Un coup de foudre dès le premier entraînement.
«Mon père ne voulait pas que son fils fasse du ballet (rires). J’ai donc fait du karaté comme mon parrain. Finalement, mes parents ont eux aussi pris des cours», dit celui qui célébrera son 34e anniversaire de naissance le 7 juillet.
Photo Métro Média – Charles Lalande
Non seulement il aime son nouveau sport, mais rapidement il figure parmi l’élite de celui-ci. À 10 ans, il obtient sa ceinture noire. Quatre ans plus tard, il affronte déjà des hommes, n’ayant pas suffisamment d’opposition dans son groupe d’âge.
L’adolescence frappe
Un coup de foudre n’étant pas éternel, celui entre Samuel Gagnon et le karaté n’y a pas échappé. Vers l’âge de 18 ans, après une décennie à s’entraîner six fois par semaine, il cesse de faire preuve de discipline.
«Je n’ai jamais fait de mauvais coups, tient-il à préciser, mais après des années à m’impliquer à temps plein dans la compétition et dans l’enseignement, cela a explosé. J’avais envie de sortir avec mes chums, alors j’ai mis l’entraînement de côté pour socialiser.»
Avant cette «solide crise d’adolescence», son entraîneur, Denis Perreault, l’appelait son cheval de course. Voyant le manque de sérieux de son poulain, M. Perreault a alors congédié celui à qui il avait préalablement offert un poste d’entraîneur à son école.
«Sur un coup de tête, j’ai aussi arrêté l’entraînement. Après un mois, j’avais envie de recommencer, mais j’étais trop orgueilleux. J’ai mis deux ans avant de revenir», explique Gagnon, petit sourire en coin quand il repense à l’époque où il était plutôt frivole.
Malgré le différend avec son entraîneur, les deux complices n’avaient pas coupé les ponts, continuant à communiquer de temps en temps. Un jour, le jeune adulte, devenu grassouillet, a pilé sur son orgueil pour demander à son coach s’il pouvait effectuer un retour à la compétition, en portant les couleurs des Studios Unis. «Il a accepté et j’ai gagné le tournoi. Ça m’a remis sur la track.»
Franchisé avec maman!
Depuis 2009, Samuel Gagnon et sa mère Lucie Tremblay sont franchisés et propriétaires de l’école de karaté Studios Unis à Val-Bélair.
«Elle a toujours été là pour moi et j’avais besoin d’elle. C’était naturel et sécurisant qu’elle embarque dans l’aventure avec moi puisque je n’avais aucune expérience en business.»
Tôt ou tard, une troisième génération pourrait s’imposer sur le tapis de karaté. Le fils de Samuel, Malik, apprivoise tranquillement le milieu en venant voir son père au bureau. «Il doit faire du sport, c’est un incontournable. Il fera des arts martiaux, mais je vais attendre que ça vienne de lui. Je ne veux pas le pousser, je veux qu’il s’amuse!»
Photo Métro Média – Charles Lalande