Atténuer l’impact des logements sociaux sur les valeurs résidentielles
C’est connu, le syndrome du «pas dans ma cour» freine l’implantation des logements sociaux dans la ville de Québec. L’argument évoqué par les opposants est la crainte d’une diminution de la valeur de leur propriété. Or, une équipe de recherche de l’Université Laval a démontré qu’une construction réfléchie selon le secteur peut réduire les effets négatifs sur le prix des maisons unifamiliales.
«On constate qu’en milieu urbain, ça n’induit pas une diminution de la valeur, bien au contraire. En fait, l’effet de densification associée à la construction neuve l’emporte sur les effets négatifs qui pourraient être associés à la présence des logements sociaux. La densification entraîne son lot d’avantages pour les achats locaux, ce qui peut amener une hausse de la présence commerciale. Cette dynamique fait en sorte que ça pousse les prix à la hausse», explique Jean Dubé, professeur titulaire à l’École supérieure d’aménagement et de développement (ÉSAD) de l’Université Laval.
En banlieue, principalement au nord, la situation est inversée, observe celui qui a été mandaté par la Ville de Québec pour étudier la situation. La construction de logements sociaux a un effet plutôt négatif sur les valeurs résidentielles avoisinantes. Dans le pire des scénarios, la dépréciation peut atteindre 4,5% dans les banlieues, alors que dans le meilleur des cas, l’appréciation peut s’élever de 2,5% au centre-ville.
Recommandations pour faciliter l’intégration
L’équipe de recherche a présenté ses conclusions et proposé quelques lignes directrices. Elle suggère entre autres d’adapter le gabarit des logements sociaux à l’endroit où on veut en construire. «Des tours se fondent bien dans le décor au centre-ville, mais ce n’est pas le cas en banlieue. Cette différence de gabarit peut contribuer à les identifier plus facilement et à les stigmatiser. Ce qui peut entraîner une diminution de la valeur des maisons», indique M. Dubé.
Outre une taille adaptée, une architecture semblable aux nouveaux logements privés rend les logements sociaux plus difficiles à différencier. L’organisation spatiale du quartier peut également réduire l’effet négatif des logements sociaux. Par exemple, l’ajout de parcs, espaces verts et infrastructures publiques amène des retombées positives. Enfin, les chercheurs s’interrogent sur la nécessité d’aller aussi loin en banlieue pour développer du logement social. En effet, l’éloignement peut contribuer à la marginalisation.
Précisons que l’analyse a considéré des logements sociaux construits entre 2000 et 2020, ainsi que des maisons unifamiliales transigées entre 2004 et 2020. Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue Housing Policy Debate. Les cosignataires sont Jean Dubé et François Des Rosiers, de l’Université Laval, et Nicolas Devaux, de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR).