OBV, archiviste de l’existence
CRÉATION. OBV – de son nom d’artiste – a marché dans les pas de son enfance. Il en a tiré un Atlas subjectif de Charlesbourg, recueil de trajets pédestres qui relient la maison où il a grandi à des lieux comme Fierbourg ou le terminus d’autobus. Présentée dernièrement dans le cadre de l’exposition Banlieue! Ordre et désordre, à Laval, l’œuvre s’inscrit dans une démarche intuitive qui tend à se lire comme un mode d’emploi de l’existence version OBV.
«C’est comme un atlas que personne ne peut utiliser», décrit en riant le principal concerné qui, pour l’exercice, ne s’est pas embarrassé de contraintes de fidélité. S’il estime qu’il s’agit là d’une œuvre formelle qui peut être appréciée pour ce qu’elle est, il en viendra néanmoins à dégager l’idée que, peut-être, l’enjeu sous-jacent n’est pas de retrouver son chemin, mais d’en explorer de nouveaux.
«Quand on habite quelque part, on connaît très peu notre quartier, on fait souvent le même trajet», retire OBV de son expérience. Lui-même a beaucoup voyagé, mais a «découvert» Charlesbourg grâce à ce projet qui, dans sa formule déambulatoire sur le terrain, lui a laissé une impression de liberté dont le recueil est teinté.
Créer sans GPS
Cela, OBV finira par le concevoir parce que pressé de questions par l’auteure de ces lignes. Autrement, le boursier de Première Ovation préfère «raconter des choses sans nécessairement tout raconter» – le public a droit aussi à sa liberté. Pour lui qui fonctionne d’abord et avant tout par intuition, il est du reste plus intéressé – et occupé – à créer qu’à analyser ce qui fonde l’unité de sa démarche. «Je ne réfléchis pas beaucoup à ça.»
Comme pour son projet d’atlas, il ne s’agit donc pas de se rendre d’un point A à un point B selon une trajectoire définie, mais de marcher. «C’est spontané. Après coup, je peux voir des tendances», avoue le nouveau résident du Vieux-Québec.
Documentaliste nouveau genre
Ses voyages, ses possessions, son quotidien, les endroits où il a habité, le monde autour de lui…: «mon travail [de création], c’est beaucoup ça», donne-t-il alors comme pistes. Depuis un an, notamment, OBV développe un projet de maquettes – «des livres d’artiste qui ne sont pas terminés et dont un seul exemplaire existe», décrit celui qui pratique l’autoédition depuis 2007.
Avec ces maquettes, il pousse plus loin la désacralisation du livre qu’il opère déjà avec les fanzines qu’il signe. «Je trouve ça intéressant de voir un peu plus les ficelles.» Faut-il s’étonner de cet intérêt de documenter le processus de création quand, déjà, l’artiste a le réflexe de documenter son existence, source insoupçonnée de nombre de ses projets.
En témoigne le recueil Des choses que Mamie dit, collection de citations notées du vivant de sa grand-mère; leur redécouverte deux ans plus tard a donné naissance à une œuvre agrémentée de photos. «Ce n’était pas prévu»: voilà la devise d’un artiste qui place l’expérience avant la destination.
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Nouveau défi
À l’invitation de Folie/Culture, OBV et sa collègue Marie Gilbert ont donné cet automne un atelier de fanzines auprès d’une clientèle ayant ou ayant eu des problèmes de santé mentale. «Je ne savais pas trop dans quoi je m’embarquais», avouera le premier, qui ressort de l’expérience fasciné par ces participants qui se sont mis en images et en mots.
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