Le décès de la reine Elizabeth II est une occasion de se rappeler que celle-ci a visité le Canada à 22 occasions au cours de son règne de 70 ans, 7 mois et 2 jours. Trois de ces visites lui ont permis de visiter la ville de Québec. L’une d’entre elles a même mené au tristement célèbre «samedi de la matraque».
23 juin 1959
Ce passage survient dans le cadre du deuxième voyage officiel de la reine au Canada. Il a lieu en marge de l’inauguration de la voie maritime du Saint-Laurent. À cette occasion, Elizabeth II et le duc d’Édimbourg passent 45 jours au pays. Arrivé du Saguenay à bord du navire Britania, le couple royal est accueilli par des dignitaires au quai de la gare maritime du Foulon. À cette occasion, la reine est accueillie chaleureusement par les citoyens de Québec, comme en témoigne Le Soleil du jour. «Depuis la pointe de l’île d’Orléans, et bien avant encore, le yacht royal, qui se dirigeait lentement vers Québec a été escorté par plus de 70 embarcations privées remplies à craquer de Québécois qui avaient voulu rendre à leur façon un hommage à la souveraine», écrit le journaliste Lucien Quinty. «Après l’accueil officiel à la gare du Foulon, l’enthousiasme populaire s’est affirmé sur tout le parcours quand la voiture royale passa dans les rues de la ville, avec un imposant cortège, en route pour l’hôtel de ville […] La ville a pris un visage de fête avec ses décorations abondantes», lit-on dans un autre texte qui figure en Une.
À cette occasion, la reine visite l’école Marguerite-Bourgeoys sur l’avenue des Oblats à Limoilou et remet de nouveaux drapeaux au Royal 22e Régiment lors d’une cérémonie tenue sur les Plaines d’Abraham. Le couple royal est aussi reçu au Château Frontenac avant de poursuivre son chemin vers Trois-Rivières sur le Saint-Laurent.
Quant à cette visite à l’école Marguerite-Bourgeoys, la reine aurait exprimé le souhait de visiter une école de Québec bien avant son arrivée. Elle y a aussi reçu un bel accueil de la part des élèves. Ceux-ci lui ont réservé une ovation selon Le Soleil. Des enfants lui ont aussi offert des fleurs.
10 et 11 octobre 1964
Son deuxième passage dans la capitale provinciale fut le 10 octobre 1964. Elle était dans la région afin de commémorer le 100e anniversaire des conférences de Charlottetown et de Québec. Ces conférences, tenues en septembre et octobre 1864, ont ouvert la porte à la Confédération canadienne en 1867. Lors de cette visite, la reine prononce un discours principalement en français devant les parlementaires à l’Assemblée nationale. Au cours de celui-ci, elle parle du français comme étant «l’une des langues les plus importantes de notre civilisation occidentale».
Dans la population, cette visite suscite très peu d’intérêt autre que celui de quelques manifestants. «Tout le long du parcours sur les plaines d’Abraham, le long du chemin Saint-Louis jusqu’au bois de Coulonge et sur la route qu’a empruntée le cortège royal dimanche pour se rendre à l’aéroport de L’Ancienne-Lorette, le spectacle offert au couple royal a été celui de militaires et de policiers armés de matraques qui n’avaient aucune difficulté à masquer la population des loyaux sujets puisque celle-ci était à peu près inexistante», raconte le quotidien L’Action dans son édition du 12 octobre. Il faut dire que sa visite se déroulait dans un climat difficile en raison de menaces du mouvement nationaliste. Plus de 4000 policiers sont mobilisés et ils sont sur les dents. D’ailleurs, leurs actions devant les manifestants seront sévèrement blâmées par plusieurs journalistes présents. L’Action titre «Gestes d’une fermeté exagérée des membres de la Sûreté municipale — 32 arrestations», Le Soleil y va avec «Le samedi de la matraque», un titre que l’histoire n’oubliera pas. Le Devoir abonde dans le même sens avec «Québec reste indifférent, mais sa police est d’une grande brutalité». Son journaliste Jean Tainturier témoigne même «d’un excès incompréhensible de rudesse et de zèle».
La reine, qui était encore une fois accompagnée du Prince Philip, a quitté Québec le 11 octobre en après-midi. Au total, elle a passé 33 heures dans la région.
21 au 23 octobre 1987
Sa dernière visite à Québec remonte à 1987. À cette occasion, elle est accueillie par de nombreux dignitaires à l’aéroport de Québec. Le lieutenant-gouverneur du Québec, Gilles Lamontagne, et le premier ministre du Québec, Robert Bourassa, se trouvent parmi ceux-ci. Comme en 1964, des manifestations nationalistes sont organisées, mais ne causent pas de débordement.
Elle participe à quelques réceptions, puis visite Rivière-du-Loup et Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Dans son édition du 22 octobre, Le Soleil parle d’un «accueil poli pour la reine». Le 22 octobre, elle «a reconnu l’existence d’une “société distincte” au Québec et donné son appui de principe à l’Accord constitutionnel du Lac Meech» lors d’un cocktail offert par le Gouvernement du Québec, raconte Denis Lessard de La Presse. Le Soleil ajoute le 24 octobre que la reine «retient de sa visite une impression profonde du sentiment d’unité qui se manifeste avec une vigueur renouvelée parmi tous les Canadiens».
À noter qu’Elizabeth II a aussi visité Québec en 1951. Elle portait toutefois toujours le titre de princesse.