La communauté musulmane de Québec a pris les grands moyens pour briser les barrières avec des citoyens de la région, en organisant l’événement À livres ouverts à la bibliothèque Monique-Corriveau.
Photo TC Media – Charles Lalande
Lors de cette journée, personnes immigrantes et visiteurs ont pu échanger sur une panoplie de sujets: parcours migratoire, vie professionnelle, intégration, religion, port du voile, famille, etc. Avant l’activité grand public, trois femmes ont accepté de raconter leurs histoires aux membres de la presse. Les voici.
Bientôt 10 ans
Photo TC Media – Charles Lalande
En décembre 2007, Khadija Zahid met les pieds au Québec pour la première fois de sa vie après avoir fait les démarches quatre ans auparavant. Un long processus enclenché par la curiosité de découvrir une nouvelle culture et un nouveau pays. Outre cela, rien n’a motivé ce changement de vie.
«Je n’avais jamais pensé venir ici. J’étais bien au Maroc, j’étais même très gâtée», raconte-t-elle avec un grand sourire. Elle a laissé une famille qu’elle aimait derrière elle, sans toutefois perdre le contact avec celle-ci. À l’emploi du ministère du Développement durable, la mère d’une petite fille de 6 ans profite de ses vacances pour retourner dans son pays d’origine.
«Je suis venue toute seule. Je me suis séparée l’an dernier. Vous voyez, nous avons une vie normale comme tout le monde, rigole-t-elle. On s’aime, il arrive qu’on se sépare, mais la vie continue!»
Sur le port du voile, Khadija Zahid apporte une nuance importante, tentant de démystifier une vieille mentalité voulant qu’il soit obligatoire de le porter. «J’ai commencé à le porter en 2011. Personne ne m’a obligée. Porter le voile, c’est entre nous-même et notre Dieu. Oui, des femmes sont forcées de le faire, mais ce n’est pas généralisé comme certains le pensent», se désole-t-elle.
Ingénieure devenue informaticienne
Photo TC Media – Charles Lalande
Ingénieure en Tunisie, Naïla Khalil a bifurqué vers l’informatique lorsqu’elle a déménagé au Québec le 27 février 2015 avec son mari et leurs deux filles. «Mes compétences ne sont pas reconnues ici. C’est une procédure qui peut durer entre trois et cinq ans, alors j’ai choisi de relever un autre défi», raconte celle qui admet que ce fut un choix difficile.
L’attentat du 29 janvier 2017 à la mosquée de Québec l’a profondément ébranlée. Cette femme qui se décrit comme étant «fonceuse» et qui adore engager la conversation avec autrui est restée cloitrée chez elle les sept jours qui ont suivi la tragédie.
«J’étais démoralisée. Je n’ai pas été sur les réseaux sociaux, je ne voulais pas lire des commentaires haineux. La première fois que je suis sortie pour aller au guichet, j’avais peur, c’était angoissant. Heureusement, j’ai senti beaucoup de soutien de la part des Québécois.»
Malgré cela, la province a «encore du travail à faire» pour mettre fin aux préjugés sur la communauté musulmane. «Il y a un milliard de musulmans dans le monde, mais je dois encore expliquer que ce n’est pas moi qui fais les attentats!» Malgré cela, Naïla Khalil compte passer le reste de ses jours au Québec. Sa famille est très heureuse et elle est persuadée que ses enfants bénéficieront d’un système d’éducation «plus encadré».
Compromis et séparation
Photo TC Media – Charles Lalande
Ingénieure mécanique, Souheila Djaffer a quitté l’Algérie pour de Montréal en 1999. «Je voulais faire des études supérieures et aller à la Polytechnique. La naissance d’un enfant handicapé intellectuellement a changé mes plans de carrière. J’ai laissé tomber mon travail.»
En 2002, une séparation l’incite à quitter la métropole pour la Vieille Capitale où elle s’est mise à faire du bénévolat dans différents milieux. Elle a notamment œuvré à titre de porte-parole du Centre culturel islamique de Québec. Elle met l’accent sur l’importance du vivre-ensemble.
«Les gens sont parfois surpris quand ils apprennent que je suis une femme seule, autonome, diplômée et mère. D’un autre côté, j’ai eu un choc en apprenant qu’au Québec, il y a des femmes violentées, droguées. J’étais persuadé que toutes les femmes ici étaient instruites et heureuses.(…) Je porte le voile, mais parfois, je l’enlève selon l’occasion. C’est une décision personnelle, qui confirme mon indépendance et non ma soumission.»